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20 janvier 2022 4 20 /01 /janvier /2022 22:42

De l’avis d’Alphonse Allais, « les familles, l'été venu, se dirigent vers la mer en y emmenant leurs enfants, dans l'espoir, souvent déçu, de noyer les plus laids ». Sur certaines plages d’Iroise, ils peuvent aussi compter sur les bactéries : il suffit en effet d’attendre qu’il pleuve pour que miraculeusement les eaux de baignade se remplissent de délicieuses Escherichia coli et de sympathiques entérocoques fécaux à l’origine d’une ribambelle de maladies en « ite »…

Si vous avez suivi les aventures de ce dossier, vous savez qu’Eau et Rivières de Bretagne et APPCL ont mené l’enquête sur « le mystère des pluies qui polluent », en commençant par le « mystère des classements qui s’améliorent ». Alors que certaines plages d’Iroise étaient fermées de plus en plus souvent et longtemps « à titre préventif » puisqu’on savait qu’il allait pleuvoir, leur classement annuel par l’ARS s’améliorait régulièrement. Bizarre coïncidence, non ?

En fait non, mais résultat d’une stratégie mûrement réfléchie : chaque fermeture permettant à l’ARS d’éliminer légalement (le pensait-elle vraiment ?) les analyses souvent polluées qui tombaient juste ce jour-là, le classement n’était au final calculé que sur les analyses réalisées les jours où l’eau était propre. Comme si les parents d’élèves pouvaient éliminer les mauvaises notes de leurs enfants de la moyenne annuelle : voilà qui améliorerait les statistiques de l’Education Nationale ! Ce n’est évidemment pas permis par la directive européenne sur les eaux de baignade. Mais pas de problème pour l’ARS, la plage étant fermée d’avance ce jour-là, pas de risque sanitaire, n’est-ce pas ? Et si le classement est bon, les touristes n’y voient que du feu, à part les quelques pervers qui commencent leur baignade par le déchiffrage des discrets arrêtés municipaux affichés dans un coin, d’autant qu’en Iroise on n’a jamais vu un maire chasser les baigneurs des plages fermées (c’est leur problème, nous on a affiché…).

La pluie de bactéries n’ayant pas convaincu pas les mauvais esprits associatifs, il a fallu travailler un peu l’argumentation : chiens sur les plages, bouses dans les rivières, fuites d’installations d’assainissement, goélands, on a tout essayé ; on arrive toujours à trouver dans l’eau trouble ce qu’on y cherche…

Pendant ce temps, ERB et APPCL continuaient à remonter le courant, et les cours d’eau. Bizarre en effet que toutes les plages systématiquement polluées soient à l’embouchure de petits cours d’eau mal surveillés ? Bizarre aussi que lorsqu’il pleut ces plages soient toutes polluées en même temps, même lorsqu’elles se situent sur 5 ou 6 bassins versants différents …Un coup monté par les goélands ? Un complot pour saboter en même temps tous les assainissements individuels ? Et si c’était… l’eau des ruisseaux qui était polluée ? Et si une cause commune de pollution se trouvait sur tous ces bassins versants ?

Bingo ! L’étude des concentrations en bactéries de ces cours d’eau a montré qu’ils étaient pollués toute l’année, bien au-delà des limites de salubrité. Un tel flux de bactéries, ça interroge : même si toute la population d’Iroise prise de coliques allait se soulager dans la nature, le compte n’y serait pas ! Et si l’explication était… sous notre nez ? En plus des 48 000 habitants pratiquement tous reliés à un système d’assainissement, le Pays d’Iroise abrite en effet des centaines de milliers d’habitants beaucoup moins visibles, porcs et bovins qui ne sortent de leurs élevages que pour aller vers l’abattoir, mais dont les « effluents » odorants sont pour l’essentiel épandus tels quels dans la nature avec leur cortège de bactéries (un porc en émet 30 fois plus qu’un humain, un bovin 5 fois plus). Voilà qui expliquerait vraiment très bien le mystère de « la pluie qui pollue toutes les plages en même temps »…

Tout cela n’a apparemment pas convaincu les élus d’Iroise, qui préfèrent continuer à chasser le chien ou le goéland, et à dépenser en assainissement collectif les millions des abonnés.

Il est vrai qu’il ne fait pas bon en Iroise jeter l’opprobre sur l’élevage, alors que l’abonné se révolte peu, et que la plupart des élus chargés de l’eau et de l’assainissement ont intérêt fort, et souvent des intérêts directs dans l’élevage qui la fait vivre : situation compliquée, en période de chasse aux conflits d’intérêt.

Il est vrai aussi que toutes ces extensions de réseau d’assainissement (Ilien Ploudalmézeau, Trémazan…) payées par les abonnés pourraient permettre plus tard d’urbaniser ces zones littorales, où il y a de juteux profits à faire sous prétexte de « loger les habitants ».


 

Signé : Bloom Toxique   (L'un de nos fidèles lecteurs)


 


 

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